vendredi 30 décembre 2011
Du yoga en antarctique
jeudi 22 décembre 2011
Croire au Père Noël en Terre Adélie
la Terre Adélie.
Et oui, croire au Père Noël en Terre Adélie c'était croire que
l'Astrolabe, notre bateau ravitailleur , arriverait avant le 25
décembre à la base de Dumont d'Urville en dépit des conditions de
glace très difficile cette année au large comme autour de la base.
Même les vents forts des jours derniers, n'ont pas réussi à «
l'éparpiller façon puzzle » comme dirait le regretté Michel Audiard.
Le pari est presque gagné car ce soir, on aperçoit ce soir
l'Astrolabe à 8 km, pas très loin du Rocher du Débarquement où Dumont
d'Urville posa la première fois le pied en Antarctique au 19ième
siècle. Il est à la limite de la zone d'eau libre bordée par une
banquise très épaisse.
Il faut comprendre que l'Astrolabe n'est pas un brise-glace et il ne
peut casser une banquise de plus de 50 cm d'épaisseur. Il n'a plus
comme solution que de se faire traîner sur la glace par une grande
armée d'empereur.
Rassurez vous l'hélicoptère ne va cesser de voler pendant quatre
jours pour débarquer les 30 personnes supplémentaires dont nos
remplaçants et l'important chargement.
Demain il y aura un repas de Noël avec près de 100 personnes.Un barbu
(ouf je ne le suis plus! ) sera réquisitionné pour s'habiller en
rouge et distribuer des cadeaux, qui n'ont pas été amenés par
l'Astrolabe, mais qui auront été confectionnés avec les moyens du bord.
lundi 19 décembre 2011
Des avions tout-terrain
La raison est qu’il est très rustique et polyvalent. C’est un avion à décollage court qu’on équipe aussi bien de roues, que de patins, ou même de flotteurs. En 5 minutes, vous transformez aussi cet avion de 18 places, en un avion de fret en repliant les sièges le long des parois. Enfin, il y a des boulons et rivets tous les centimètres. Bref, c’est du solide !
Il s’est récemment posé sur la banquise à coté de l’Astrolabe, notre bateau ravitailleur bloqué dans les glaces depuis 1 mois, pour apporter des vivres et ramener les personnels tant attendus sur la base. C’était une première. La piste avait été balisée avec des sacs-poubelles orange et l’avion s’est posé cahin-caha après plusieurs survols, sur une banquise très accidentée. Aussitôt en sortant de la carlingue les pilotes ont rassuré les futurs passagers: « don’t worry, we are professionnal »* .
En Antarctique, il faut bien comprendre que les avions ne sont présents qu’en été, car les conditions climatiques rudes, et la nuit polaire ne permet aucun vol de mars à septembre. Devinez d’où viennent ces avions qui volent autour en Antarctique ? Très étonnamment, de l’Arctique !
Étant donné que dans le Nord canadien les avions ne peuvent pas voler en hiver pour les mêmes raisons et que les saisons sont inversées entre les deux pôles, une société rentabilise intelligemment ses pilotes et ses Twin-Otter en les transférant du Nord au Sud au cours d’un voyage peu banal.
En plusieurs étapes, une petite escadrille de 3 Twins traverse le continent américain dans toute sa longueur en passant par les Antilles, puis en longeant la cordillère des Andes jusqu’à une dernière escale au Chili à Punta Arenas. Puis, c’est la traversée dangereuse entre le Cap Horn et une base de la péninsule Antarctique où l'on remplace les roues par des patins. Finalement, ils traversent ensuite notre 6ième continent en faisant une halte à la station du pôle Sud, pour rejoindre les stations proche de la Mer de Ross qu’ils vont desservir pendant 4 mois : Mac Murdo, Terre Nova, Dumont d’Urville et Concordia.
Entre ces deux dernières bases, il existe une des stations-service les plus paumées de la planète. Une fois posé au lieu-dit « D85 », le pilote n’a plus qu’à glisser sa carte Bleue dans le distributeur, taper son code et attendre la voix métallique qui annonce « vous pouvez vous servir vous en Kérosène sans plomb 95 à la pompe numéro un »… Je plaisante évidemment. Il ne s’agit que de quelques fûts et d'un tuyau dans un simple conteneur au milieu du désert de glace. Pas même un cahier pour écrire difficilement avec ses moufles « Tango Alpha 61 a pris 300 litres de kéro le 12 décembre ».
En Guyane, le Twin-Otter assure la liaison quotidienne entre Cayenne et Maripasoula. On le retrouve également sur certaines lignes intérieures du Surinam, le pays frontalier. Ainsi, à une heure de pirogue de Maripasoula, sur la petite piste en herbe et cahoteuse de Lawa-Tabiki se bousculent tous types d’avions à décollage court en partance et en provenance de la ville de Paramaribo. Cette destination est très prisée par les noirs marrons et même les amérindiens car ils ont coutume d’aller faire des achats dans la capitale du Surinam bien mieux achalandée et bien meilleur marché que Cayenne, la ville endormie.
La sécurité est très limite : pas de contrôle aérien, pas de tour de contrôle, pas de copilote, et la navigation s’effectue à vue à travers les averses tropicales. Pendant mon séjour, deux crashs aériens avaient eu lieu avec des Antonov An-14. Sept personnes d’une même famille du village Antecume Pata avaient disparu, marquant profondément la communauté amérindienne.
Les vols sont pittoresques. Je me rappelle avoir entendu des poules glousser quelque part dans l’avion avant le décollage. En vol, le bruit assourdissant du moteur couvrait largement leurs bruits et rendait même les conversations difficiles. De toute façon, mon voisin de gauche était un petit réfrigérateur.
L’embarquement à Paramaribo était aussi très cocasse. Après avoir acheté notre billet forfaitaire de 100 kilos, nous devions monter sur le plateau d’une grande balance avec tous nos bagages ou nos sacs de course. Un homme avec la complicité de la compagnie rachetait alors les kilogrammes que vous n’aviez pas « utilisés » pour les revendre aux enchères dans une ambiance bien moins policée qu’une salle de vente Parisienne. Pour tout vous dire, c’était une véritable foire d’empoigne !
*« Ne vous inquiétez pas, nous sommes des professionnels »
Merci à Jean-Benoît pour la photo du Twin Otter se posant à côté de l’Astrolabe et à Sylvain pour la photo de « D85 » (Kilomètre 85 sur la piste du Raid motorisé vers Concordia).
samedi 10 décembre 2011
DSK en Antarctique
mercredi 7 décembre 2011
Prédateurs tachetés
Un séjour en antarctique n'est pas sans danger, vous l'imaginez bien.
Les risques qui prédominent dans ces paysages inhospitaliers sontbeaucoup moins liés à la faune importante qui nous entoure qu' aux rudes conditions climatiques et à la glace si sournoise.
Le passage à travers une banquise fragile dans une eau inférieure à 0° est le danger le plus courant. Sortir de l'eau seul est très difficile car on ne peut s'appuyer sur les bords de la glace sans la casser un peu plus.
Se perdre dans un « whiteout » parfois à quelques mètres d'un bâtiment est aussi un classique qu'on aime raconter mais rare. La visibilité devient alors nulle par la neige et le vent et cette perte de repères est telle, que certains ont du mal à tenir debout ou ressentent une sensation de mal de mer.
Fréquenter trop près le glacier et les icebergs est à nos risques et périls. Leur caractère figé est bien trompeur car des pans de glace de plusieurs tonnes peuvent s'écrouler sans prévenir.
Sur le continent, les crevasses masquées par des ponts de neige sont des pièges redoutables pour les marcheurs et les engins mécaniques. Un de ces tracteurs à chenille repose d'ailleurs au fond d'une
crevasse à côté de la base depuis quelques années. La crevasse s'est depuis refermée et le glacier poursuit sa lente progression vers la mer... Peut-être le distinguera-t-on un jour à travers la glace translucide d'un iceberg à la dérive…
A la différence de l'Arctique où l'ours polaire est un danger omniprésent sur la banquise L'environnement animal autour de notre base est plutôt paisible. Chez nos biologistes, les accidents de travail originaux que j'ai pas osé déclarer cette année sont un hématome provoqué par un coup de bec d'un oiseau, un coup d'aileron
de manchot et une morsure de phoque.
Il y a pourtant en Antarctique un prédateur dont on ne se méfie pas assez. Il s'agit du léopard des mer. Cet animal qui ressemble à un phoque, est un carnassier mangeur de manchots et moins un amateur de
poissons comme son cousin. Lorsque la banquise disparaît, il rode invisible le long de ses berges pour se saisir de ses proies à peine ont-elle mis le pied sur la glace. En effet, ces nageurs vifs et rapides deviennent soudainement des marcheurs nonchalants très vulnérables. Son menu de choix reste les jeunes manchots encore duveteux, se mettant à l'eau pour la première fois à la fin de l'été austral.
Mais ce prédateur quand il patrouille le long des berges se dit parfois que ces très grands bipèdes aux couleurs si vives pourrait constituer un repas bien copieux. Certains se sont fait déjà peur en s'approchant un peu trop près des bords de la banquise. Il jaillit hors de l'eau en s'échouant lourdement sur la berge de la banquise pour tenter de vous saisir. Une fois sur la glace, le dandinement de ses 350 kg est bien insuffisant pour vous rattraper heureusement.
Il y a quelques années, un hivernant marchant tranquillement sur une banquise peu épaisse s'est fait une grosse frayeur. Un Léopard d'un coup de tête, a transpercé les 15 cm de glace et a saisit sa botte grand froid. Plus de peur que de mal et un retour à la base à cloche pied sans sa chaussure. À la base Dumont d'Urville, nous
restons donc sur nos gardes bien qu'aucun accident sérieux n'ait eu lieu. Dans tout le continent antarctique, on ne lui attribue qu'un décès par noyade d'un plongeur scientifique en 2003.
L'origine de son nom vient certainement de son caractère de prédateur et de son pelage tacheté comme ces félins des régions tropicales.
En Guyane, le félin le plus connu est le jaguar. Il a plutôt peur de l'homme, mais les amérindiens s'en méfient car il s'attaque volontiers à leurs chiens de chasse. Cet animal n'en demeure pas moins pour eux un animal sacré et fait partie de leur mythologie. Il est souvent représenté sous forme symbolique dans leur art et
leurs peintures corporelles de cérémonie qu'on voit hélas de moins en moins.
L'autre menace de cet animal, dont les amérindiens ont moins conscience est son implication dans une maladie qui s'appelle la « Toxoplasmose Amazonienne ». Vous connaissez sans doute la toxoplasmose que l'on rencontre en Europe. Celle maladie transmise par le chat est seulement dangereuse chez la femme enceinte et les personnes dont le système immunitaire est affaibli. Dans la forme amazonienne, il s'agit d'une souche très agressive donnant souvent des formes graves ou prolongées quelle que soit la personne. On soupçonne le jaguar d'être le félin, à l'instar du chat, qui dissémine ce parasite microscopique dans la nature et que l'on
attrape en mangeant du gibier sauvage. Ce n'est pas exceptionnel puisque j'avais eu l'occasion d'en prendre en charge une demi-douzaine au centre de santé de Maripasoula en 3 ans.
Pour finir ce « post » je dirais que les premiers naturalistes polaires devaient être plus nourri de récits d'aventures africaines qu'américaines car les jaguars sont un des rares félins à aimer l'eau. Ils se baignent régulièrement et pêche même à l'occasion. Je trouve donc que le « Jaguar des mers » aurait été plus approprié et mon parallèle avec la Guyane dans ce blog, encore plus pertinent !
Photo du jaguar : Capture d'écran d'un extrait du reportage « passion sauvage en Guyane » de Nicolas Jouvin
Photo du léopard des mers : Merci Guillaume!